mercredi 9 février 2022

Comment l'altitude bonifie mets & vins à La Bouitte ?

 

En réunissant depuis 2004 à La Bouitte - dans le plus grand domaine skiable du monde Les 3 Vallées en Savoie - vignerons, scientifiques et critiques vins, les Chefs triplement étoilés au Guide Michelin René et Maxime Meilleur analysent l’influence de l’altitude sur le vieillissement et la dégustation des vins et des mets... 


La dégustation des mets et des vins en montagne procure d’intenses plaisirs, grâce à des saveurs et des sensations inconnues en plaine. Le vieillissement des vins, l’affinage des mets, l’art de cuisiner et de déguster évoluent en effet au gré de l’altitude. Avec une pression atmosphérique et un taux d’oxygène plus faibles, un air léger, froid et sec, les Chefs doivent ajuster leurs méthodes de cuisson.

L’eau bout à 95° à La Bouitte : ainsi, il faut une bonne minute supplémentaire pour cuire un œuf mollet. Le temps pour faire lever la pâte à pain, est réduit de moitié, sous l’action amplifiée du gaz carbonique. Les vins rouges ont clairement des tannins plus fondus et des matières plus suaves. Et les Champagnes trouvent leur statut de vins de fêtes, avec des bulles plus effervescentes et fines, des arômes aériens et nuancés, un équilibre parfait entre tension et plénitude. Jusqu’à présent, le comparatif se faisait sur des vins déjà mis en bouteille.

EN JANVIER 2020, RENÉ ET MAXIME ONT IMAGINÉ UNE NOUVELLE EXPÉRIENCE INÉDITE...

Ils décident d’analyser l’influence de l’altitude durant la phase d’élevage du vin jusqu’à sa mise en bouteille. C’est en chenillette qu’ils ont transporté en janvier 2020 une barrique en chêne de 225 litres jusqu’à leur restaurant d’altitude Le Bouche à Oreille - à 2 700 m d’altitude - dans une cave semi-enterrée bénéficiant d’une température constante et d’une hygrométrie adéquate. Une expérimentation menée avec Michel et Fabien Brotons - père et fils - du Clos de l’Ours. Un jeune domaine prometteur en biodynamie à Cotignac dans le Var (Provence).

L’OBJECTIF ÉTAIT DE CONFIRMER L’EFFET DE LA HAUTE ALTITUDE SUR L’ÉVOLUTION GUSTATIVE de leur cuvée ultime « Ursus » 2019 rouge (3400 bouteilles seulement à 90% Syrah et 10% Mourvèdre) en la comparant 2 ans plus tard au même vin élevé dans d’autres barriques comparables au domaine viticole à 230 m d’altitude. Le vin vient d’être mis en bouteilles manuellement au Bouche à Oreille avec dégustation à la clé. Michel Bettane, réputé l’un des plus grands critiques vins au monde, nous a fait l’amitié de sa présence, pour tirer les enseignements.

Le vin originel du Domaine est remarquable par sa typicité, sa densité, sa longueur en bouche. Il a la concentration, la richesse des grands vins Sudistes, avec une belle tension et de la fraicheur en finale. Il fait honneur à sa région. Quant au vin vieilli en altitude, il confirme nos conclusions précédentes sur l’impact de la pression atmosphérique et de la raréfaction de l’oxygène. Il offre une plénitude supplémentaire par rapport au vieillissement en plaine. Le fruit (noir en dominante, notamment sur la myrtille, épicé et réglissé) est incroyablement épanoui et charmeur.

Le vin est sphérique avec un grain de tanin tout en sensualité et en harmonie. La profondeur est accentuée avec une pureté remarquable, de la précision et un caractère ciselé. La polymérisation des tanins est optimisée, conduisant à la complexité du vin et à un effet « umami » de l’altitude.

Les autres bouteilles poursuivent leur vieillissement au Bouche à Oreille pour être commercialisées par le Domaine en 2023. Fort du succès de cette opération hors du commun, le Clos de L’Ours réitère l’opération sur le dernier millésime d’Ursus (2021). Une nouvelle barrique sera transportée en dameuse au Bouche à Oreille aux dernières neiges du printemps. Commence également une nouvelle aventure, à savoir le vieillissement de la cuvée « Cœur d’Apremont » 2019 de Jean-Claude Masson - un des plus grands vins blancs de Savoie - expérimenté cette fois sur 4 sites : à 400 m d’altitude et à 50 m de profondeur sous l’eau dans le lac d’Annecy au large de Sévrier, en plaine au Domaine à 320 m, à La Bouitte à 1502 m et au Bouche à Oreille à 2700 m.

Là encore, ce sera une première de comparer simultanément sur une même cuvée les effets de l’altitude sur le vin de la plaine à 2700 m, et sous l’eau. A partir de l’été 2022 et pour une durée indéterminée, nous suivrons l’évolution gustative de ce vin emblématique du territoire savoyard sur ces 4 étages d’altitude.

Informations : www.la-bouitte.com

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