Le Gofio est
un produit emblématique des îles Canaries depuis plus de 1 000 ans.
Fabriqué selon les coutumes qu’utilisaient les aborigènes des îles
dans des moulins traditionnels, le secret de sa valeur en tant que
super nutriment réside dans le fait qu'en plus de fournir une grande
énergie, le Gofio conserve la totalité de sa fibre naturelle. C'est
pourquoi, cette farine, grillée au feu et moulue de manière
traditionnelle est restée un trésor pour les Canariens faisant partie
de leur culture. De ce fait, le Gofio est protégé par l'Union
européenne au même titre que l'huile d'olive ou le vinaigre de
Modène, avec la dénomination de Produit d'Identification Géographique
(IGP). En outre, il est en passe de demander sa reconnaissance par
l'UNESCO comme faisant partie du patrimoine culturel immatériel des
îles Canaries. « Quand un aliment reste
dans l'alimentation d'un peuple pendant des centaines, voire des
milliers d'années, cela signifie qu'il est devenu une partie de son
identité. La façon dont il est élaboré, et dont il est présenté créé
toute une culture autour de celui-ci. Non seulement à table, mais
dans toute la société qui le cultive à travers des chansons et des
fêtes », explique Antonio González Padrón, historien et chroniqueur
officiel de Telde à Grande Canarie.
Le Gofio canarien est
consommé depuis des siècles dans l’archipel, que ce soit seul,
mélangé à l'eau, au lait, au ragoût canarien, à un bouillon dans
l'escaldón, plat typique canarien ou dans toute recette qui contient
de la farine. C'est pourquoi les chefs de la nouvelle cuisine
canarienne l'ont adapté à leurs cartes, le positionnant ainsi à une
catégorie gastronomique. D'après Dolores García
Martín, spécialiste des produits primaires du Comité de dégustation
du Gofio au sein du Gouvernement des Canaries : « le Gofio est plus
sain que n'importe quelle autre farine car en le grillant, il
conserve tous ses nutriments. C'est aussi une alternative pour les
personnes allergiques au gluten puisqu'il est élaboré avec du blé,
mais il peut aussi être élaboré avec du millet, du seigle, de l'orge,
des pois chiches, des pois et du quinoa. De même, nous pouvons le
déguster dans toutes les îles à partir de différents aliments : d'une
céréale ou d'un mélange de plusieurs céréales. »
« Peu de communautés
autonomes ont un plat traditionnel aussi complet sur le plan
nutritionnel que le sancocho », explique Mabel Ojeda, diététicienne
et nutritionniste. « Aux Canaries, nous mangeons du Gofio accompagné
de mojo (une sauce pimentée canarienne), qui contient beaucoup de
nutriments, de protéines et d’acides gras oméga-3 provenant de
graisses végétales et de poisson. » Le Gofio, selon Mabel
Ojeda, « est un hydrate de carbone à absorption rapide qui peut être
utilisé comme source d'énergie. Il contient également des fibres, de
sorte qu'il ne produira pas un pic de glucose drastique dans le
corps. Cela en fait un complément alimentaire très utile à consommer
avant et après un entraînement sportif, une randonnée ou toute activité
liée au tourisme actif », ajoute-t-elle. Catahysa Cabeza Carrillo
est technicienne en gestion du patrimoine, historienne et l'une des
chercheuses du projet "La culture de Gofio aux Canaries :
Stratégies pour sa sauvegarde", réalisé par l'entreprise Trivo
et financé par l'Institut de développement culturel des Canaries. Il
a été identifié à partir de l'élaboration traditionnelle du Gofio
dans les moulins des îles. « Nous avons constaté, souligne-t-elle,
que la façon de l'élaborer dans les moulins est la même depuis la
conquête des îles en 1492. Au début, le Gofio était grillé et moulu
dans une maison et distribué aux voisins. Après la colonisation
castillane, il a commencé à être fabriqué dans les moulins. Là, le
processus est resté le même : cueillette du grain, battage,
torréfaction et mouture. » Dans tous ceux qui subsistent aujourd'hui,
on peut respirer l'inoubliable arôme du Gofio fraîchement grillé et
écouter le tournoiement mélodieux des lames qui broient le grain sur
la pierre. Visiter ces lieux d'architecture traditionnelle pour
obtenir cet aliment fraîchement préparé est un voyage dans le passé
des îles, qui se connecte directement avec le palais du présent et
dynamise l'esprit comme il l'a fait il y a mille ans avec les
aborigènes canariens.
« Dans l'archipel, 34
moulins restent en activité toute l'année pour produire en continu le
fameux Gofio canarien car c'est un aliment fondamental pour
comprendre notre identité. En effet, explique Cathaysa Cabeza
Carrillo, jusqu'à la fin du XXe siècle, nous ne mangions pas de pain
mais nous mangions du Gofio. Le Canarien se reconnaît dans ce produit
qui a été consommé durant des siècles par toutes les classes
sociales. »
Cette étude a permis
d'identifier l'élaboration traditionnelle du Gofio dans des moulins
tels que La Máquina ou El Chano à La Orotava à Tenerife ; au moulin
La Molineta à San Cristóbal de La Laguna ; au moulin de San Pedro à
La Atalaya de Santa Brígida et au moulin de Fuego de Telde, tous deux
à Grande Canarie ; au moulin à Gofio Imendi à San Sebastián de La
Gomera ; au moulin à Gofio El abuelo Pancho à Valverde à El Hierro ;
au moulin de Las Breñas à Breña Baja à La Palma ; au moulin de la
Asomada à Puerto del Rosario à Fuerteventura ; ou encore au moulin de
Esteban Gil Cejudo à San Bartolomé à Lanzarote, entre autres.
Selon cette étude, il
existe également quinze moulins dans l'archipel, qui fabriquent le
Gofio, reconnus comme d'intérêt culturel. Il s'agit notamment du
moulin à Gofio Risco de las Pencas à Santa Cruz de Tenerife, du
moulin Barber, à San Mateo, et du moulin de Agua à Firgas à Grande
Canarie. « Il est important de noter, ajoute Cathaysa Cabeza, que le
Gofio des îles Canaries possède quatre formes de patrimoine. Ainsi,
c'est un patrimoine immatériel, car il s'agit d'un commerce qui a
commencé au XVe siècle, et c'est aussi un patrimoine industriel, car
les moulins où il est fabriqué sont des constructions de grande
valeur architecturale. De même, cet aliment est également un
patrimoine ethnographique, avec toute une série d'activités
culturelles qui en parlent, et c'est un patrimoine archéologique,
puisque sa consommation trouve ses racines chez les autochtones
canariens et peut être retracée dans des sites archéologiques. » | | | | |
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